Nous sommes une seule famille: la devise de la fédération internationale des échecs.
A la marge, une famille problématique, selon les faits divers.
L'origine, le niveau social, l'orientation politique, les gens veulent voir en haut du podium une personne à laquelle ils peuvent s'identifier. Ils forment des clans pour soutenir leur héros et sous couvert de rivalité sportive suivent leurs bas instincts. Cela peut engendrer des violences: la coupable s'est justifiée en invoquant d'interminables complots contre elle venant de groupes soutenant sa rivale.
Par vengeance, notre joueuse a trempé les pièces du jeu de son adversaire dans une substance toxique. Grand prix de la niaiserie pour avoir effectué son forfait devant une caméra.
Un crime sordide dans un environnement difficile. Avec la guerre, les invitations se font rares et les championnes russes se déchirent pour des problèmes d'égo.
Mes élèves se plaignent de tensions et de mauvais comportements à la table de jeu, s'ajoute pour les angoissés la crainte des tricheurs connectés et maintenant des empoisonneuses!
Une tentative de déstabilisation puérile en match par équipe: Avant le coup d'envoi, mon adversaire goguenard me demanda si j'étais tchétchène. Il m'expliqua: Angoulême avait payé des mercenaires de l'est surnommés les tchétchènes. Par extension, comme professionnel, j'avais pris l'appellation.
Dans l'idéal de la rencontre sportive, les concurrents sont des voyageurs sans bagages et le combat se fait à égalité.
Je n'ai jamais été fan de ces discussions d'avant match parfois biaisées par la volonté d'un protagoniste d'entamer la guerre psychologique.
Après cet épisode dénigrant et raciste, j'étais heureux que la partie commence. Il devrait se taire.
Le but était de faire tomber ce matamore.
Dans cette partie, j'entamai une belle extraction du roi. Un cavalier à la bande inemployé revint à la vie et me ravit.
Pour les costauds, mat en quatre, la revanche des tchétchènes!
J'eus un champion de France à Amiens en 2001. Je faillis faire un doublé car ma fille Capucine finit deuxième.
Le père du garçon était issue d'une famille d'industriel dans le carton mais l'arrivée du plastique mena l'usine à la fermeture.
A midi, il menait son fils au restaurant, descendait une bouteille de vin, fumait un cigare et montait le bourrichon à son fils: « Ton adversaire a une petite crotte dure dans le ventre. Elle lui fait mal et l'empêche de réfléchir ».
L'interaction des familles avec les élèves est souvent une catastrophe, ils augmentent le stress et ne connaissent les nécessités de la pratique compétitive.
Cette argumentation particulière marchait et je regardais stupéfait, ce gamin calme, rester à genoux à la japonaise pendant des heures et gagner ses parties à l'usure. Je m'occupais de l'aspect technique, le gosse était bon stratège.
J'étais peu habitué aux succès et j'étais déboussolé car ma fille aussi raflait tout. Elle avait un style plus expéditif. Elle rata la timbale de peu après une dernière ronde mouvementée. Elle avait beaucoup de pratique. Elle m'accompagnait dans les tournois lents. Le syndrome du cordonnier mal chaussé: J'eus des regrets car je l'entraînais peu, je n'avais pas remarqué qu'elle était compétitive.
Champion, le garçon était en haut de la pyramide mais pour se maintenir, il devait travailler et prendre des cours particuliers réguliers. Le père n'avait pas d'argent. Il s'était monté la tête, le titre était impossible à valoriser. Son rêve était d'amener son fils dans les championnats internationaux. Les autres nations ne faisaient pas de compétitions dans les moins de huit. Il chercha des sponsors et des subventions.
Jaloux, au club limousin, les dirigeants eurent une réaction minable. Ils s'insurgèrent contre sa démarche individuelle et lui mirent des bâtons dans les roues. Ils revendiquaient le traitement égal pour tous, étalaient des idéaux de gauche. Une tête dépassait, il fallait la couper. Ils montaient des dossiers pour demander des subventions pour envoyer dans les championnats nationaux des gamins cossards. Le niveau général s'affaiblissait. Aucune importance, ils embauchaient des animateurs débutants pour les cours.
Aux championnats de France, l'entraîneur analysait en détail des parties faites à la va vite où les bourdes arrivaient tous les trois coups.
Une imposture et elle menait à une impasse. Au fils du temps, ces faux talents s'aperçurent de leur inconsistance.
Le père du champion ne reçut aucune aide. Je ne m'impliquais pas assez à son goût. J'étais assez indifférent à ses démarches, le gosse avait gravi une marche mais je savais qu'il devait aller beaucoup plus haut pour rentabiliser ses efforts. Le père me comparait à un lapin qui joue du tambour quand on met des pièces dedans et qui s'arrête dès qu'il n'est plus alimenté. Il était marrant.
Du coté du club, j'avais troublé leur harmonie. Naquit une sérieuse opposition contre moi. A terme, cela cassa mon école d'échecs. Gagner ce championnat m'apporta surtout des nuisances.
Nous retournâmes aux nationaux en poussin et le gamin était insuffisamment préparé Il tomba dans des pièges d'ouverture. Le père alcoolique souriait en expliquant avoir des artères gonflées comme de vieilles chambres à air et une péterait d'un jour à l'autre. Il ne venait plus suivre les parties dans les tribunes avec des jumelles. Il restait à se saouler à la buvette.
Comme prévu, il disparut rapidement. La veuve voulant éviter le marigot échiquéen, le gosse arrêta de jouer.
Pour les championnats de France jeunes de Montélimar, la plaquette de présentation était superbe. Différentes formules tout compris, du luxe dans de bons hôtels pour descendre jusqu'à l'hébergement collectif. Un tournoi des accompagnateurs avec de jolis prix était programmé.
L'organisateur, un débrouillard, était apparu dans le monde des échecs et s'éclipsa rapidement ensuite.
Des rumeurs disaient que des familles avaient erré la première nuit dans la ville à la recherche de leur hébergement. Au deuxième assaut lorsque les poussins étaient arrivé le mercredi, l'organisateur principal, au bord de la syncope et complètement débordé tremblait devant des parents récriminant.
La belle salle de tournoi avait sauvé l'événement. Les enfants jouaient dans de bonnes conditions, la tension s'était dissipée.
J'avais pris l'hébergement collectif basique bon marché car j'étais payé au forfait par la ligue.
La nuit, à coté de moi, de joyeux titrés bulgares se saoulaient avec des alcools forts. Je résolus le mystère de ces festivités: ils avaient gagné la semaine précédente un open à Lyon et l'énorme prix à la clé. Ils jouaient en équipe, arrangeaient leurs parties et se répartissaient les gains. C'étaient des nomades des échecs, passant d'un open à l'autre. Ce tournoi était pour eux une pause, un entre deux.
L'organisateur indélicat annonça qu'il ne pouvait pas assurer les prix promis.
Deux bulgares partirent lors d'un jour de congé prendre les deux premiers prix du rapide de Périgueux. Ils avaient des cartes de cheminots internationaux et se déplaçaient gratuitement.
A leur retour, il y eut une discussion avec les arbitres: Des maîtres invités avaient fait forfait une ronde au milieu de l'open pour aller en jouer un autre. Les accusés invoquèrent le manque à gagner du fait des prix non assurés; Ils conclurent sur des torts partagés. Les fautifs purent reprendre le tournoi. Ces forfaits d'un jour me profitèrent car je pus me glisser dans la grille écornée des prix.
Les championnats jeunes internationaux se jouent d'ordinaire dans des dictatures soucieuses de redorer leur image ou dans des stations touristiques durant la morte saison. C'est une affaire commerciale mais dans la plupart des cas, mêmes si les tarifs d'hébergement restent conséquents, l'accueil et les prestations demeurent de qualité.
Le niveau moyen des championnats jeunes internationaux n'est pas élevé. La FIDE a le souci de recevoir le plus possible de nations. Elle donne même un coup de pouce aux fédérations nécessiteuses pour envoyer des émissaires. Une fête pour happy few. En contre partie de ces aides, il faut bien voter. Un pays égal une voix. Le président fédéral est difficile à déboulonner.
Touzé, gérant du club de Belfort, édita une plaquette attrayante et garda les tarifs habituels d'hébergement et de restauration mais organisa son championnat dans un des coins les plus déshérités de France, une sordide banlieue HLM et les commodités sur place étaient celles d'un camping bas de gamme.
Une vieille patinoire servait de salle de tournoi et il y régnait une chaleur suffocante. Pour des centaines de joueurs, trois cabines de toilettes chimiques furent installées dans la cour. Il fallait faire la queue pour y accéder et elles étaient d'une saleté repoussante. Les gamins écourtaient leur parties pour ne pas y passer.
Touzé s'étant fâché avec le service informatique et il n'y avait pas de site pour suivre la compétition. Les arbitres durent s'en arranger. Ils firent asseoir les gosses trois heures avant de lancer la première ronde.
Belfort n'ayant pas une grosse capacité hôtelière, Touzé affréta des cars pour amener les joueurs à leurs hébergements. Le premier soir, les cars n'étaient pas là. La même histoire circulait, Touzé s'était fâché avec la compagnie de bus. Des malheureux traînèrent la nuit à la recherche de leur hôtel. Au matin, une file de gens faisait réclamation et Touzé, économisant des frais d'interprète, les envoyait promener dans un mauvais anglais.
Une délégation ayant payé pour l'option luxe s'était retrouvée dans un hôtel minable, sale et sans confort à plus 40 km. Ils perdaient leur temps dans de longs trajets de car. C'était général, nous étions tous bernés.
Au restaurant, une tente installée sur le site, la nourriture était correcte et en abondance, mais pas de latrines. La salle de tournoi étant fermée, la gérante hargneuse du bar du club de tennis miteux à proximité vendait ses consommations mais gardait ses toilettes à l'usage exclusif de ses membres. Restaient les buissons pour se soulager.
Touzé s'était ancré sur les flux entrants pour l'argent comme pour la nourriture mais ne s'était pas soucié des flux sortants.
Des participants et des fédérations du monde entier crièrent à l'escroquerie et voulurent la peau de Touzé, lui ôter tout droit d'organisation. Il n'y eut ni procédure ni sanction.
Touzé avait toujours des affaires en cours au tribunal. Il connut une brève renommée en gagnant un procès contre Air France car la compagnie voulait, vu sa masse exceptionnelle, le faire payer double.
Malheureusement, comme nous le subîmes lors de ce championnat, Il écrasait les gens en dehors des couloirs des aéroplanes.
Avant le championnat eut lieu un stage de préparation à Saint Lô pour les qualifiés. J'étais enthousiaste à l'idée de participer à un grand événement et certains détails ne m'alertèrent pas: Mes collègues ne faisaient pas des cours de qualité. L'un d'eux, réputé, faisait juste du divertissement en racontant l'origine du jeu d'échecs. Deux adolescentes avaient fait le mur la nuit en cassant une vitre. Une autre fit une crise d'angoisse car la soirée blitz s'éternisait.
Forte de ses trois participants limougeauds, la ligue limousin m'envoya à Belfort. A sec, pour financer notre séjour et mon emploi, elle demanda une subvention exceptionnelle à la région.
Je partis vaguement inquiet car j'avais payé assez cher l'hébergement de ma fille Capucine qui jouait en benjamine. Mon job tenait sur un pari, rémunéré si l'aide était donnée.
Pour réduire les frais, un parent nous véhicula à Saint Lô et ensuite à Belfort. L'arrangement ne se révéla pas judicieux car l'argent arrivé, le père de famille présenta une note de frais imposante et voulut tout prendre. Au final, j'eus les frais engagés pour ma fille pris en charge.
A Belfort, l'hébergement collectif des français était un internat de collège. Une longue troupe d'une centaine de garçons et filles de 9 à 20 ans logés dans un dortoir.
A l'arrivée, un type proposa une chambre pour une personne seule et je levais le doigt.
C'était la chambre de surveillant. Un poste central au dessus de l'entrée d'où je pouvais tout voir. Une trappe cachée permettait de contrôler les allées et venues mais je n'en fis pas usage. Mes collègues étaient à l'étage.
Mauvaise place; laissés à eux mêmes, mélangés garçons et filles et après des journées éprouvantes dans cette patinoire surchauffée, les jeunes eurent des comportements aberrants. Les douches étaient inondées et des rigoles d'eau envahissaient les couloirs. Ils jouaient avec les extincteurs. Un moment, ils se coururent derrière pour se beurrer le cul avec de la pâte à tartiner.
Il n'y avait pas un échiquier dans les chambres, il n'était pas question de performance.
Je m'énervais, je faillis sortir crier un grand coup, mais étant un entraîneur presque bénévole, je n'allais pas passer mes nuits à essayer de contenir ces endiablés.
Ma fille s'était installée à l'autre bout du dortoir, je m'inquiétais pour sa sécurité. Elle s'adaptait mieux que moi et ne vint pas se plaindre.
Il y eut un retour, les jeunes furent convoqués à une réunion et un cadre du collège leur demanda de cesser ces débordements. Il évoqua des taches brunes suspectes sur les murs ainsi qu'à l'étage supérieur. Notre responsable fédéral, un type de Saint Lô, partit dans une colère soudaine.
« A l'étage se trouve la fine fleur des entraîneurs français et vous osez les mettre en cause? » Le débat s'arrêta là, à ma grande déception.
Les nuits, la foire continua et j'en pris mon parti. Je n'allais pas mourir à cause d'une semaine sans sommeil.
Des entraîneurs revenaient joyeux et bien bourrés de virée nocturnes à des heures indues en braillant dans les escaliers. A part quelques bars à entraîneuses, il n'y avait pas grand chose la nuit à Belfort mais cela semblait les contenter. Aux voix aiguës, je reconnaissais des élèves parmi eux. Placé où j'étais, au dessus du porche, ils me réveillaient. Je maudissais la terre entière.
Le manque de surveillance du dortoir affecta les deux garçons limousins. Ils étaient dans la même catégorie. Un parlait peu, très effacé, l'autre faisait un sport de combat. Profitant du chaos, la nuit, le plus fort secouait le plus faible. Le père du tourmenté, notre chauffeur, partit dans une colère sans fin. Lorsque nous étions dans son véhicule, il pleurait sur sa vie, une vraie détresse. Il était dépressif, cet incident prenait des proportions anormales. Je ne supportait plus ses cris, je pensais à rentrer par le train.
Il menaçait de s'en prendre au gosse incriminé. Il m'en voulut car je fis tampon.
Vraiment une sale ambiance pour faire de la compétition.
J'avais tenté une médiation auprès des garçons, ils étaient logés avec deux gentils frères du nord. Ma fille les appelait les Chocapic. Le gamin frappé n'avait pas l'air dans son assiette mais je ne pouvais pas faire le pied de grue toute la nuit chez eux dans cette pétaudière. Durant la semaine, le cogneur reçu un colis de confiserie de la part de sa mère. Cela provoqua une armistice mais ils firent une indigestion.
Toujours animé par la même conscience professionnelle, j'arrivais dans les premiers le matin à la table du petit déjeuner et s'y trouvaient assis, très proche, un entraîneur et une gamine de 16 ans. C'était malsain, il semblait être en couple. Le type avait facilement trois fois son âge. Chaque matin, je retrouvais ce tableau et je me corrigeais. « Non, ils vont faire une préparation, tu as l'esprit mal tourné.»
Ce n'est pas une légende, les entraîneurs d'échecs draguent leurs élèves mineures. Ils attendent l'âge légal pour s'afficher avec elles et le problème est récurrent.
Sur cette question des relations entraîneurs jeunes élèves, comme père de famille, je fus touché deux ans plus tard.
Ma fille Capucine à 14 ans fut invité à un stage fédéral pour des espoirs nationaux avant les championnats de France adulte. A la fin du stage, je la réceptionnais et elle me raconta que des entraîneurs venaient jouer au poker en buvant des bières dans la chambre des adolescentes durant les nuits. Des pratiques purement pédophiles. Le non respect de l'intimité, le manque de sommeil, braver les interdits, jeux d'argent, alcool. Ils étaient à l'affût. Un moment, elle s'endormit et ils lui mirent une canette dans la main et firent une photo pour se se moquer d'elle ensuite. J'avais juste son témoignage. Plusieurs fois, je lui avais demandé s'ils l'avaient touché. Non. J'étais complètement abasourdi. Il y avait une complaisance et un laisser faire incroyable dans les échecs en France. La maison était trop petite pour que ce manège passa inaperçu. Quelles réactions eurent les parents? Furent ils mis au courant par leurs gamines?
Je laissais filer, je n'étais pas dans ma région. Une procédure prendrait du temps et m'empêcherait de jouer le championnat. Si je faisais des histoires, j'allais passer pour un pisse froid. Ces gars là étaient proches des dirigeants. Je pouvais être mis sur la touche. Ma fille pris deux bulles aux deux premières rondes du tournoi, elle dormait tout le temps, complètement épuisée après ce stage de pervers.
A Belfort, en plus des limousins, je suivais cinq jeunes d'autres ligues. Je les retrouvais le matin pour une vingtaine de minutes pour analyser ou préparer leur futurs adversaires. Ils arrivaient pas trop frais après leurs nuits mouvementées mais faisaient bonne figure. Ma fille venait s'entraîner. Les conditions de jeu étant déplorables, nous avions convenu qu'elle pouvait laisser filer le tournoi. Elle revenait avec l'adresse de ses adversaires pour leur envoyer des cartes postales.
J'avais un cadet très sûr de lui mais il me choqua en jouant un cavalier en diagonale. Il dut abandonner car à part ce coup illégal, cette pièce n'avait aucun bon coup à sa disposition.
La fédération m'avait elle donné les plus faibles? Non. Nous avions des joueurs moyens. Les qualifications avaient été larges. Le but premier étant de remplir les caisses de l'association. Touzé devait se servir un salaire de prince et aimait les grands gueuletons. Il y invitait des notables. Pour l'honorer, un open porte son nom.
Ayant vingt minutes d'entraînement le matin, les enfants allaient jouer sur un terrain de sport proche. Un esprit sain dans un corps sain. Devise repris par notre responsable fédéral.
Un gamin était venu me rapporter une histoire, affolé. Un camarade plus âgé avait sauté sur l'animatrice engagée pour les divertir. Elle s'était enfuie, apeurée.
La journée patte blanche, la nuit tout est permis. Rentré à l'aube, saoul, le gars avait oublié cette règle tacite. Je me demandais s'il serait sanctionné. Je n'en entendis plus parler.
Des parents impossibles, des gosses turbulents, des organisateurs irresponsables, des collègues jouisseurs. Je mis quelques semaines à me remettre de cette virée à Belfort. Mes dernières illusions sur la profession d'entraîneur s'étaient évanouies.
Le Kazakhstan est un grand pays sur la route de la soie chinoise. La chine y construit des infrastructures et importe les matières premières sans que le peuple kazakh profite des retombées.
Les kazakhs sont une nation de premier plan aux échecs.
Ils avaient engagé une tripotée de joueuses dans ce championnat du monde féminin, organisé chez eux à Almaty.
La seule chinoise en lisse, Tan Zhongyi arrivé première ex aequo devait faire un match de départage en blitz pour le titre avec une joueuse locale, Dinara Saduakassova. C'était l'occasion pour la nation kazakhe de prendre une revanche symbolique sur le colonisateur. Du moins, certains durent le ressentir de cette manière.
Curieusement, les deux jeunes protagonistes furent appelé pour un test anti dopage, juste avant les blitz de départage. Intriguant moment choisi par les organisateurs car cela brisait la concentration des joueuses au moment le plus stressant de la compétition. La chinoise, peu confiante devant cette demande impromptue, s'enfuit. Obéissante Dinara Saduakassova , la joueuse locale fit le test et perdit le match et le titre.
Curieux micmac car les tests anti dopage sont très rares dans les compétitions d'échecs.
Le lendemain, Dinara Saduakassova ne se présenta pas aux championnats du monde de blitz. Une compatriote, Bibisara Assaubeyeva conserva son titre. L'honneur national était sauf
Lorsqu'il joua contre Carlsen à la première ronde, Népomniachtchi fit une performance faible. Carlsen, frustré, déclara que Népomniachtchi ne lui avait rien opposé lors cette partie. Comme lors de la deuxième partie du match à Dubai.
Nous savons que dans le passé, du temps de l'URSS, il y eut des guerres psychologiques autour du titre mondial. Etait ce une tentative de déstabilisation? Susciter l'incompréhension: Comment un type qui joue aussi mal peut il se placer aussi haut dans la hiérarchie mondiale?
Il y eut ces deux défaites de Firoudja aux candidats à Madrid et une nouvelle à la deuxième ronde de Saint Louis. La finale de tour fut joué de façon très passive par Firoudja. Népomniachtchi mène 3 0 en classique contre Firoudja cette année. Un score anormal car les défaites sont rares chez ces hauts classés. Cela rend Népomniachtchi inatteignable pour les autres compétiteurs. Malgré les beaux sourires de Firoudja, les soupçons d'arrangements subsistent.
Troisième ronde. Hans Niemann joua une partie presque parfaite contre Carlsen. Le pourcentage de coups du module était impressionnant.
Ce fut l'élément déclencheur et Carlsen quitta le tournoi.
Cette crise à Saint Louis met en lumière le problème endémique de la triche aux échecs et peut être la FIDE se sentira elle obligé de faire des propositions pour corriger le problème. Avec un président de la FIDE, ancien ministre de Poutine, nous pouvons toujours espérer.
Je faisais ma tournée des petits opens locaux et j'en gagnai un paquet, souvent sans opposition réelle.
Un jour à Poitiers, un groupe de jeunes bons joueurs apparut. Ils avaient déjà un certain niveau et Bouvier m'annula sans difficultés en jouant une ouverture pourrie. Je compris tout de suite que ma tache serait désormais plus rude dans le poitevin.
Les échecs sont comme les montagnes russes, un coup, il peut y avoir une embellie dans le clermontois et çà coule, un autre moment, c'est le bordelais. Cela dépend beaucoup des structures locales, des subventions, de l'engagement ou de la disparition de certains dirigeants des animateurs, des entraîneurs, de la motivation des jeunes mais en général, c'est instable.
Isolé dans un désert échiquéen, occupé par mes cours pour débutants et ma famille, mon niveau a stagné. Ces jeunes étaient talentueux et devinrent tous MI ou MF.
Bouvier après avoir souffert dans l'animation aux échecs partit gérer un café, Saada entra dans l'éducation nationale, Mullon alla faire de la politique fédérale à Paris. Il se plaça selon ses propos, « sous la gouttière». C'est à dire proche du pouvoir, d'où ruisselle l'argent.
Vincent David resta sur place et devint entraîneur. Mauvaise pioche. C'était un collègue, chasseur de primes dans des tournois alimentaires. Il fit ses normes l'été où il reçut une promesse d'embauche à temps plein comme entraîneur à Belfort mais Touzé était un employeur impossible et il revint vivre dans la précarité dans la région centre.
Je le retrouvais sur mon parcours et pouvais le jouer dix fois dans l'année. En rapide, il était très doué. Son point faible était son répertoire stable et facile à préparer.
A la table de jeu, il avait l'air fragile d'un oiseau sur une branche. Il était instable psychologiquement et j'avais un jour été gêné par ses tremblements et son apparente douleur physique lors d'une partie qui tournait en ma faveur.
J'avais des résultats potables contre lui mais s'il m'avait plus poussé dans les zeitnots, il m'aurait battu plus souvent.
Moingt, un socialiste arriva à la présidence fédérale, la pente vers l'amateurisme était déjà marquée mais apparurent alors des discours sur les vilains professionnels et les tournois gratuits et ceux réservés au moins de 2200 proliférèrent.
Un apartheid des joueurs contre leurs champions locaux.
Un milliardaire à 1200 pouvait entrer, un sans domicile à 2200 était exclu. Ils aimaient pas leurs chefs, ni les premiers de la classe et voulaient se retrouver au club entre eux, entre galériens des échecs. Ils ne voulaient pas que le meilleur gagne. Ils voulaient célébrer un gars comme eux, un gars qui travaille la semaine et qui est à trente pour cent le samedi, pas un type qui révise ses variantes et arrive frais pour les expédier. Ils m'avaient expliqué, n'avoir rien contre moi en particuliers: «T'es un gars gentil mais on ne veut pas de professionnels dans nos tournois». Même pour les cours, ils préféraient les bénévoles. Des extrémistes.
Pour comprendre le monde, intéressons nous à l'économie.
Pleins de tournois gratuits, des compétions jeunes avec des buvettes.
Lors d'un petit open, ma fille à dix ans m'avait expliqué «C'est super, les buvettes, au lieu de mettre les sous dans la caisse, tu les mets dans ta poche» Je lui avais dit que je ne voulais plus la voir aller «aider» à la buvette. Tout le monde n'avait pas mes scrupules.
Dans ma ville, la personne la plus véhémente pour la gratuité et l'exclusion des professionnels gérait la buvette. Cette buvette marchait très bien. Grillades, frites, boissons alcoolisées à gogo. Des cinquantaines de participants, de nombreuses manifestations, pas d'impôts, pas de contrôle.
Il y avait des subventions et les cotisations et pas de frais, les cours aux bénévoles. Aux assemblées générales, quelques vieillards assoupis validaient les comptes.
Les associations, il n'y a pas mieux pour gratter. Pas la gratte honnie des joueurs professionnels, une autre gratte, une gratte de gestionnaires.
Les politiques municipaux venaient faire des discours sur l'engagement bénévole.
Dans ce club d'échecs, la question fut mis à l'ordre du jour par un gars ambitieux qui voulait faire le ménage. Pourquoi, depuis des années, la même personne gérait elle la buvette? Il y eut un gros clash.
Les meilleures choses ont une fin.
Peut être un cas particuliers, il y a des bénévoles intègres idéalistes mais en général méfiez vous des discours angéliques.
Cette période de gratuité forcenée dans les tournois ne dura pas, peut être une dizaine d'années. Cela s'atténua au fil du temps.
Des bons joueurs d'opens furent impactés. Le GM Marciano voyant l'open de Mont de Marsan passer à moins de 2200 déclara que la France devenait le pays le plus intolérant du monde et arrêta sa carrière. Plein d'autres suivirent, forcés.
Les maîtres avaient investi des années pour étudier le jeu d'échecs et en tirer un revenu et ces politiques changèrent les règles et leurs ressources tombèrent.
Les discours gauchistes firent fuir de gros sponsors privés. Plus de tournoi à l'aveugle à Monaco et à Paris, le Nao, le meilleur club français, berceau de Vachier Lagrave s'évapora.
Notre équipe nationale fut même impliquée dans une triche pour toucher des primes de matchs. La dèche touchait les meilleurs joueurs français, ce fut certainement cette vilaine histoire, étalée dans les journaux qui coûta son poste de président à Moingt, ce grand bavard.
Ces réformes expulsaient les pauvres;
Les petits tournois primés leur permettaient de continuer à étudier le jeu et d'espérer atteindre l'élite. En coupant ces portes, seuls les gens fortunés continuèrent à jouer.
A la façon de Coubertin, «l'important c'est de participer», entre fortunés.
Le top 12, ce sont des amateurs entre 2200 et 2300 aux frais défiscalisés qui se font étriller par des professionnels étrangers. Le principe est de trouver pour les équipes des gens imposables pour que cela ne coûte rien au club. Par le biais des niches fiscales sur le remboursement des frais dans les associations, l'argent public finance la domination des échecs par la classe aisée.
Parenthèse, il y a beaucoup d'enseignants à la fédération et comme dans l'éducation nationale, ils font passer les leurs en priorité. Je n'ai pas fait le pedigree de tous nos champions mais les jeunes GM Demuth et Lagarde, des joueurs doués au demeurant, ont un parent enseignant.
Le drame de Vincent David était qu'il vivait seulement de ses gains en tournoi et de ses cours.
Ces politiques de la terre brûlée lui cassèrent le moral et le tuèrent. Il tomba dans la misère totale et se retrouva dans l'impossibilité de payer ses factures. La période la plus dure pour nous était l'été car il n'y avait pas de cours et il disparut en automne, à la reprise. Il ne savait pas gérer ses papiers et n'avait pas les minimas sociaux. La baisse des prix dans les tournois. Il m'en avait parlé. En Loire atlantique, 200 participants avec une inscription à 10 euros et un premier prix bloqué à 150. Ils diluaient les prix ou gardaient de gros pourcentages pour les clubs. Dans des régions entières, il n'y avait plus un sou à gagner dans les échecs. Des salauds avaient pris leur bâton de pèlerin pour prêcher partout la bonne parole, le tout gratuit.
Après son décès qui semblait un suicide, des campagnes furent menées sur le net pour prétendre qu'il était mort de ses vices. Le seul vice qu'il avait était d'aimer le jeu d'échecs et de vouloir en vivre. Tout le monde l'a oublié maintenant mais je fus choqué par son décès soudain.
Ce dernier tournoi des candidats fut le cavalier seul de Népomniachtchi; Les meilleurs joueurs mondiaux, après des mois de préparation, semblaient incapables de lui poser un quelconque problème. Plusieurs joueurs jouèrent bien en dessous de leur niveau normal contre lui. Des spécialistes avancèrent différentes hypothèses: Il avait le pouvoir d'hypnotiser ses adversaires. Il profitait du travail fait lors du précédent cycle. Il était sous coté.
Pourtant lors de son dernier match contre Carlsen, il fut particulièrement minable. Après les premières défaites, Népomniachtchi s'était mis à plat ventre et son jeu semblait du simple sabordage. Jamais challenger ne s'était fait descendre aussi rapidement dans une finale de championnat du monde. La possibilité d'une fraude sur les paris sportifs venait immédiatement à l'esprit car le match se jouait à Dubaï, temple du capitalisme sauvage.
Une hypothèse plausible serait aussi la corruption ou l'intimidation des participants par les politiques dans ce tournoi espagnol. Les dès pipés et le vainqueur décidé d'avance.
Les états participants: D'abord, l'Iran dictature islamique par l'intermédiaire de Firoudja récemment arrivé en France, la Chine et la Russie, d'autres dictatures en guerre contre l'occident. Ensuite venaient la Hongrie et la Pologne, des démocraties faiblissantes tenues par des nationalistes d'extrême droite. Pour finir l'Azerbaïdjan, un état belliqueux représenté par Radjabov, un joueur peu touché par l'esprit des lumières; Les deux américains étaient en minorité.
Le totalitarisme s'infiltre dans tous les aspects de la vie individuelle. Hors de question qu'un juif possiblement homosexuel d'un pays capitaliste décadent gagna le tournoi. Leur préférence irait plutôt pour un russe issu de de la bonne école patriotique.
Avant une partie décisive, Firoudja s'amusait à faire des séries de parties en bullet sur internet, montrant au monde qu'il faisait juste le tour, comme on dit pour les chevaux.
Pour ces champions, les tournois de la Fide avec toutes leurs lourdes contingences nationalistes ne sont plus indispensables, la crise du covid l'a montré. Les tournois sur la toile leur permettent de vivre grassement.
Le spectacle était pitoyable, de petits écoliers heureux, habitués à baisser la tête devant les tyrans.
Il y a un tropisme pro russe chez les joueurs d'échecs car les maîtres russes font l'actualité échiquéenne depuis plus d'un un siècle. Des faits devraient nuancer cet attachement.
L'inscription ce mois ci sur la liste des personnes visées par les sanctions américaines de deux anciens joueurs de l'élite mondiale, Lautier et Karpov, n'est pas une surprise.
Les compromissions du monde échiquéen avec le régime de Poutine ne datent pas d'aujourd'hui. En 2015, l'ex président la FIDE, un proche de Poutine en place durant 22 ans, a été touché par les sanctions américaine et a du démissionner. Aucune banque ne voulait plus abriter le compte de la FIDE. Certains tournois d'échecs étaient simplement sponsorisés par des mafieux du pétrole.
L'agression de l'Ukraine par les troupes russes a été condamnée par les instances fédérales mais les joueurs russes pourront continuer à jouer sous drapeau de la FIDE. Difficile de renier complètement ses anciens maîtres.
Voyant l'extrémisme de Poutine monter, Lautier et Karpov auraient dû abandonner leur position.
Déjà durant l'ère soviétique, Karpov aimait le pouvoir fort, centralisé et il montrait peu d'empathie pour la dissidence.
Devenu député à la Douma, il a voté l'invasion de l'Ukraine.
Lautier était fatigué d'analyser les finesses positionnelles de la berlinoise, il a obtenu un poste important dans la finance moscovite. Un pari risqué, la Russie est surnommée par les économistes: «Une station service équipée d'ogives nucléaires»
Avec peu de diplômes, Lautier avait peu de possibilités d'insertion en France. Un champion d'échecs de niveau mondial a une grosse capacité de travail et est capable de prendre les meilleures décisions dans un environnement conflictuel; Il a eu ses entrées chez les russes.
Quand Poutine exterminait les populations syriennes et tchétchènes, Lautier s'enorgueillissait d'avoir réussi sa reconversion et s'affichait comme un golden boy dans les magazines économiques.
Poutine a agrégé contre lui les puissances occidentales en agressant l'Ukraine et s'est montré un piètre stratège en matière militaire.
Comme un dictateur antique, il élimine ses élites pour assurer son pouvoir et offre les têtes pour calmer le peuple. Sale temps pour les mouches.
Fini les négociations en dollars et les propriétés en occident. Voilà nos deux compères transformés en mauvais fous de cases noires. Un comble pour des grands maîtres!
Les chinois sont bloqués dans leur dictature à partie unique pour cause de stratégie zéro covid, dommage pour leur belle équipe de prétendants.
Une occasion pour l'armada russe de revenir à l'assaut du titre mondial. Il y en avait un ou deux par poule. Les pépinières d'échecs russes soutenues par le régime font émerger les talents et ils sont nombreux dans les tournois qualificatifs.
Les américains utilisent une autre méthode. Tout en aidant un peu leurs joueurs locaux, ils achètent les bons élèves dans le monde entier et les font concourir sous leur bannière.
En Europe de l'ouest, l'amateurisme est plébiscité et les sponsors sont rares. Les quelques champions épars et sans soutien ont du mal à s'installer dans l'élite internationale.
Ce tournoi a été un complet fiasco pour les russes car le marché s'est imposé avec deux américains en finale. L'un d'origine japonaise et l'autre Aronian venant d'Arménie. Nakamura, le lauréat, parlait dans une interview de son début de parcours dans une poule « facile » avec deux russes et un français. Bacrot, notre français a fait vingt cinq pour cent contre les russes et n'a rien lâché contre l'américain mais Nakamura a réussi à se sortir du piège. Après le reste a été presque plus facile.
Nous n'aurons certainement pas de représentants des démocraties d'Europe de l'ouest au tournoi des candidats. Il y a bien Firoudja pour la France mais il a été formé en Iran, un pays peu sympathique au niveau politique, alors il ne compte pas.
Ces grands maîtres policés issus des régimes nationalistes font bonne impression mais dans les pays dont ils sont la vitrine, c'est le martyr des opposants, l'agression des pays voisins, les populations écrasées.
Les championnats du monde de blitz et de rapide en Pologne étaient superbes. Vachier Lagrave sortit son épingle du jeu. Chessbase India capta les émotions et les moments importants de ces événements en vidéo.
C'étaient des tournois de masse et de nombreux seconds couteaux s'étripaient dans l'arrière cour pour tacher de récupérer quelques miettes du festin, au grand bonheur des internautes, ravis d'assister à la curée.
Aux échecs, le moindre point faible dans la défense et l'ennemi s'y engouffre. La prophylaxie est une mesure très importante.
Quelques champions d'échecs, voyant des menaces arriver de partout finirent paranoïaques.
Dans ces championnats, les joueurs furent imprudents. En pleine explosion de la pandémie, ils enlevaient leurs masques pour jouer.
Comme chacun sait, les virus aiment le beau jeu et font la trêve pendant les parties.
Si vous passiez par l'Australie, contrôle strict aux frontières et mesures barrières. Le tournoi était à Varsovie, aucune consigne spéciale pour cette grippette.
Nakamura, un des meilleurs américains, testé positif quelque temps après et sorti du tournoi, toussait tranquillement sur ses adversaires. Un cluster au milieu des meilleurs joueurs mondiaux.